lundi 15 décembre 2008

Témoignage fictif : Le brigand crucifié

SaluuuuuuUut !

Pour cette semaine, j'avais à coeur de vous partager un texte que j'ai écrit il y a plusieurs années déjà, qui me tient toujours énormément à coeur. Il s'agit d'un témoignage fictif, d'un homme qui a sans doute fait des choses atroces dans sa vie, puisqu'il a été condamné à mourir crucifié, ce qui à l'époque des Romains était le châtiment réservé aux pires monstres de l'humanité. Mais là, sur la croix, tout a basculé, parce qu'il a passé les dernières heures de sa vie à côté d'un homme qui a lui aussi été crucifié, sur la croix à côté de lui... mais cet homme-là était innocent. Pire : il avait choisi de mourir volontairement, à la place de millions de milliards de coupables. L'Evangile de Luc nous raconte une petite partie de l'histoire de cet homme, un brigand crucifié à la droite de Jésus. Pour le reste... j'ai fait travailler mon imagination. Qui était cet homme ? Un zélote, c'est-à-dire une sorte de révolutionnaire de l'époque, rebelle à l'autorité romaine autant qu'à l'autorité religieuse Juive ? Peut-être même un camarade du fameux Barrabbas, l'assassin libéré à la place de Jésus sous les cris de la foule ? Ou bien, un tueur à gages payé par un haut personnage politique pour éliminer un rival lors de la fête de la Pâques ? Ca arrivait fréquemment à cette époque. Ou encore, un brigand de grand chemin qui tuait les voyageurs et volait leurs biens ? Nous le saurons au Ciel. Mais... place à la fiction. Donnons la parole à cet homme.

Lire la suite

"Je suis né dans la province romaine de Judée dans une famille juive type, pratiquant la religion juive comme tous à l'époque, par tradition et sans grande conviction. J'ai été élevé dans une petite ville dans laquelle mon père exerçait un petit métier d'artisan, comme plus ou moins tous les hommes de l'époque. Depuis ma plus tendre enfance, je voyais mes parents, ma famille et mes amis souffrir des abus de pouvoir de l'armée romaine qui occupait le pays. Ma famille attendait la venue du Messie, grand Roi des Juifs annoncé par les prophètes, dont tous pensaient qu'il viendrait les délivrer du pouvoir de l'envahisseur romain et instaurer le règne des juifs sur la Terre. Mais au cours des dernières décennies, il ne passait pas une semaine sans que l'on n'entende parler d'un nouveau Messie auto-proclamé, qui rassemblait une petite dizaine d'hommes, lançait quelques menues attaques contre des postes militaires romains, était arrêté et duquel quelques jours plus tard on n'entendait plus parler. Alors moi, après quelques centaines de déceptions, j'en avais marre d'attendre. J'étais un jeune homme à ce moment-là, et comme beaucoup de jeunes de ma génération je décidai de fuir le foyer familial et de m'engager dans le mouvement clandestin de rébellion, sans me soucier de ce Messie duquel on me rabâchait les oreilles et qui tardait à venir (d'ailleurs, le pouvoir religieux ne valait guère mieux que l'armée romaine, il savait s'y prendre pour exploiter la Loi en leur faveur). Je suis vite devenu un "dur", j'étais connu et apprécié pour de nombreux coups glorieux contre des politiciens avides de pouvoir, des légionnaires qui exploitaient les pauvres paysans juifs, des Pharisiens plus préoccupés par leur pouvoir personnel que par la volonté divine... A vrai dire, je me souciais très peu à cette époque-là de l'existence ou non d'un Dieu : s'il existait, il n'avait qu'à faire notre travail à notre place ! La vie religieuse était tellement intéressée par l'argent et le pouvoir, et les excès des Pharisiens si bien connus en Judée, Samarie et Galilée*, que je me disais que Dieu devait être comme eux.
Mais un jour, tout s'effondre : à la fête de la Pâque, je suis arrêté par les soldats romains alors que je tentais d'approcher un centurion pour l'assassiner, et je connaissais le prix à payer si un gars de mon genre était arrêté : la croix, immanquablement.
Effectivement, ce fut ce qui arriva : le 10 Avril de l'an 33 selon votre calendrier**, je fus conduit sur le mont Golgotha, où avaient lieu les crucifixions. Une foule immense s'était assemblée pour se moquer de moi, m'injurier. La colère me remplit lorsqu'un soldat romain cloua mes mains et mes pieds à ma croix, jointe à un sentiment d'impuissance. Je ne pouvais rien faire pour l'arrêter, et la douleur physique n'était rien comparée à ma détresse d'avoir échoué dans ma mission. Avec moi étaient deux autres crucifiés : le premier un vieux copain à moi, qui avait participé à plusieurs mauvais coups ensemble avec moi, et qui avait été arrêté en même temps que moi ; mais le deuxième, qui fut cloué entre nous deux, moi à sa droite, mon copain à sa gauche : Jésus de Nazareth !!! Personne dans toute la Palestine n'ignorait le nom de cet homme, mais les opinions à son sujet étaient assez controversées. Certains disaient qu'il était le Messie promis, et il l'affirmait lui-même et faisait beaucoup de miracles inexplicables pour le soutenir, mais, contrairement à tous les autres pseudo-Messies, il ne cherchait pas à s'enrichir aux dépens des autres, mais au contraire enseignait aux hommes l'amour les uns envers les autres, l'honnêteté et l'intégrité morale... D'autres, notamment les chefs religieux que sa prédication dérangeait parce qu'il n'hésitait pas à mettre en lumière leurs activités frauduleuses et l'immense écart entre leur conduite et leur enseignement, prétendaient que c'était un fou et un imposteur. Ce qui rendait le personnage d'autant plus énigmatique était que ce simple fils de charpentier de la petite ville de Nazareth n'avait pour ainsi dire aucune éducation, mais que cependant il connaissait les Écritures Saintes mieux que les scribes et les Pharisiens les plus érudits. Même moi, le rebelle vivant en-dehors de la société, j'avais entendu parler de cet homme qui, considéré comme fou par ses propres frères, parcourait le pays avec un groupe de 12 hommes qu'il appelait ses disciples, guérissant des malades partout où il passait, ayant toujours une conduite très charitable envers tous, et invitant les hommes au repentir. "Repentez-vous, disait-il, car le Royaume de Dieu est proche ! " Mais je me souciais peu d'un tel individu, j'en avais tellement vu de la part des pseudo-Messies que je me disais que s'il était vraiment le bon (et ça m'était au final parfaitement égal) il devrait s'allier à nous, à notre leader Barrabbas (qui, heureusement pour la rébellion, avait été libéré à la demande des responsables religieux juifs qui avaient droit à une libération de prisonnier à chaque fête de la Pâque) pour qu'ensemble nous chassions enfin ces chiens de Romains ! Mais que penser d'un homme qui prêche l'amour envers ses ennemis, et la repentance comme moyen d'accès direct au pardon de Dieu ? Devrions-nous aimer les Romains qui nous maintenaient en esclavage ? JAMAIS !!! Mais tout de même, être crucifié à côté d'un tel homme qui avait fait tant de bruit au cours des 4 dernières années avait quelque chose de surprenant. Comment les chefs religieux juifs, dont tous savaient qu'ils cherchaient depuis très longtemps à le faire mourir parce qu'il les dérangeait en dénonçant ouvertement leur hypocrisie, avaient-ils fini par parvenir à leurs fins ?
Bien vite, ce fut lui qui devint le centre d'attraction général, et qui recevait toutes les moqueries. "Fils de David," criait la foule, "Fils de David, si tu es le Messie, descends de la croix." Mon copain et moi nous joignîmes aux moqueries. Tout près de lui, un groupe de femmes pleuraient, il s'agissait de la mère de Jésus et de quelques femmes qui, touchées par son amour, l'avaient suivi. J'imaginais la détresse de ces femmes, qui avaient cru en lui comme leur libérateur et maintenant voyaient tous leurs rêves s'écrouler devant leurs yeux. Non, ce n'est pas possible que cet homme soit le Messie, ce jour marquait la défaite de Jésus de Nazareth. Un nom en plus sur la liste des "Messies" que les Romains avaient tués. En je renchaînai sur les moqueries, criant toute ma haine envers ce personnage qui était tout aussi impuissant que nous à nous délivrer de là.
Mais là, je regardai son visage. Et comme ses yeux croisaient les miens, je vis une expression étonnante sur son visage. Pas de la colère d'avoir échoué, comme je le pensais. Pas non plus une froide résignation. Mais, au milieu du sang et des larmes mêlées, on pouvait lire une immense tristesse, une douleur inexprimable par les mots, mais au travers de cela une paix immense. Alors je compris enfin : cet homme était vraiment le Messie, et il souffrait là le châtiment de tous les hommes de l'histoire, il payait le prix de toute la haine que le monde avait engendrée.
Quel choc ! Toute ma vie se déroula très vite devant moi en quelques minutes, je voyais ma rébellion et tout le sang que j'avais versé, je revis la colère et la haine qui avait dicté toutes mes actions, je me souvins du premier homme que j'avais tué, du deuxième, du troisième... Tous les crimes atroces que j'avais commis me revinrent en mémoire, et pour la première fois de ma vie je me vis tel que j'étais réellement : un criminel, un meurtrier, un monstre... un pécheur. J'avais vécu toute ma vie en laissant la haine et la colère dicter toutes mes actions, j'avais commis tant d'horreurs... et cet homme, crucifié à quelques mètres de moi, lui qui avait toujours été innocent, lui qui avait passe quatre longues années à annoncer l'amour et le pardon, lui l'agneau pur, payait le prix de mes crimes. Je compris l'immense souffrance qui se lisait sur son visage, car non seulement son corps était endolori de façon épouvantable, mais de plus cet homme savait qu'il payait en ces instants le prix du pardon de tout un chacun. Le destin du monde se jouait en ces quelques heures.
J'entendis la voix rauque de mon camarade renchérir aux moqueries : "Si tu es le Messie, alors sauve-toi, et sauve-nous !" Et je lui répliquai : "Ne crains-tu pas Dieu même maintenant, que tu vas mourir ? Nous avons mérité ce châtiment ; mais celui-ci n'a rien fait pour mériter la mort." Puis, à l'adresse de celui dont j'avais compris qu'il était le Sauveur de toute l'humanité : "Jésus, pense à moi quand tu viendras dans ton Royaume." J'avais très peu d'espoir, il me semblait être passé à côté du but de ma vie, avoir échoué sur toute la ligne. Je croyais qu'il était trop tard. Mais la réponse de Jésus fut déroutante : "Je te le dis, aujourd'hui encore tu seras avec moi au Paradis." Mes yeux croisèrent ceux de mon Sauveur, et je vis au-dedans de lui la joie de voir un criminel tel que moi se repentir d'un cœur sincère de tous ses crimes, et qu'il m'offrait bien volontiers le pardon. J'avais tant péché, et tant m'avait été pardonné ; alors comment pouvais-je, moi, refuser le pardon aux autres ? Aussi, à cet instant précis, je pardonnai aux Romains, à ceux que j'avais combattu toute ma vie, je leur pardonnai tout ce qu'ils avaient fait à la Judée.
Mon calvaire dura encore plusieurs heures, mais celui de mon Seigneur fut nettement plus court. Et, juste avant de rendre le dernier soupir, il prononça ces mots, qui restèrent dans ma tête jusqu'à l'instant de ma mort : "Tout est accompli." Oui. Tout était accompli. Le Messie avait rempli sa mission, le monde entier pouvait maintenant être pardonné. Et c'est la paix dans le cœur pour la première fois de ma vie que je m'en fus auprès de mon Sauveur. Tout est accompli. Le Royaume de Dieu est venu, comme il l'avait annoncé, dans le cœur de tous ceux qui l'acceptent."

*A la mort du roi Hérode I° de Palestine, celui qui a cherché à faire mourir Jésus en faisant tuer tous les enfants nouveaux-nés de la ville de Bethléhem par ses soldats, la province romaine de Palestine fut séparée en trois provinces, sur lesquelles régnaient sous tutelle romaine (comme leur père) les trois fils du roi précédent. Ces trois provinces furent du Nord au Sud : la Judée, la Samarie et la Galilée.

**Date traditionnelle de la crucifixion de Jésus.

Aucun commentaire: